Jérémy a une obsession. C'est un film. La guerre des boutons d'Yves Robert d'après le roman de Louis Pergaud. C'est parce que cette œuvre le ramène à son enfance oubliée qu'il décide un jour de revenir jusque dans sa Beauce natale pour retrouver ses racines. Ce retour au passé lui permettra de construire son propre présent, de dépasser ses doutes, ses souffrances, ses hésitations d'homme de 40 ans... pour enfin regarder devant et non plus derrière lui. La guerre des boutons n'est pas si loin... Si j'aurais su... est un hommage au goût de vivre.
Extrait du livre :
Il se retrouve bientôt sur une route, hésite à rejoindre un village sur la gauche mais finalement emprunte ce passage boisé qui s’offre à lui. Ces sentiers, cette rivière, ce léger vent qui vient s’engouffrer dans les grands peupliers, ces mélanges d’odeurs émanant de cette terre asséchée par la saison… toutes ces particules rappellent l’enfance. Tout ! Les fruits sauvages s’agrippant sur les ronciers, le meuglement des vaches, le hennissement d’un cheval… parce qu’un gosse a le temps de sentir, de regarder, d’écouter… parce que sa tête n’est pas encore polluée de mille conneries qui viennent encombrer son esprit et en chassent toute la poésie.
Au loin, Jeremy aperçoit les premières maisons d’un hameau. Comme de toute façon le chemin n’est plus praticable, il remonte vers l’église. Armenonville est semblable à toutes ces bourgades qu’il a traversées depuis qu’il séjourne dans la région. Il va jusqu’aux tilleuls et s’arrête devant une pompe à eau. Il aurait aimé se passer de l’eau sur le visage et boire quelques gorgées, mais plus rien ne fonctionne. C’est étrange comme l’endroit lui est familier. Il fait quelques pas, reconnaît une ou deux maisons. Ça ressemble à du déjà-vu. Plus palpable qu’Ymeray dans ses souvenirs. Comme dans un rêve récurrent. Aurait-il oublié un gros morceau de son passé ?… Et cette habitation sur la gauche ?… Le village fait une boucle. Jeremy revient au point de départ. Quel est le lien entre Armenonville et son enfance ?… C’est en tout cas quelque chose d’agréable, une vraie bouffée de fraîcheur. Comme il revient devant l’église, il s’assoit sur un banc. Toute une partie de la rue, les maisons, l’école… tout est son enfance.
A force de réflexions, une idée germe. Et si tout cela n’appartenait pas à ses souvenirs ? Et si, pour une fois, Jeremy n’était pas son propre centre d’intérêt ? Et si dans ce village il n’avait été qu’observateur ?… Que l’enfance des autres se soit jouée ici sans qu’il en soit l’acteur… !!
Le visage de Jeremy s’illumine tout à coup… Il se lève d’un bond, traverse la route, entre dans une cour et se retrouve devant l’unique salle de classe de l’ancienne école. Il colle son visage à la fenêtre. Jeremy n’en croit pas ses yeux ! La Guerre des boutons a été tournée ici, à quelques kilomètres de ses racines. Yves Robert avait choisi Armenonville comme lieu idéal pour immortaliser l’enfance.
Notes perso :
Ce premier roman est ma carte de visite. Grâce à cette passion pour la Guerre des Boutons d’Yves Robert, je suis allé au bout d’une histoire. Bien après la sortie de ce roman, j’ai eu la joie de rencontrer mes héros. Tigibus, Lebrac, Grangibus, alias Martin et François Lartigue et André Treton, sont devenus mes amis. C’est ce qui m’a poussé à organiser, en septembre 2011, les cinquante ans du film avec une bonne partie des acteurs retrouvés. Ce roman m’a aussi permis de découvrir Jean-Denis Robert, le fils d’Yves, qui est devenu lui aussi mon ami et, accessoirement, mon photographe préféré !